Les outils numériques facilitent-ils la vie de tous les parents ?
À l’instar de nombreux chercheurs, Pascal Plantard remet en cause la réalité scientifique d’une « fracture numérique », terme fourre-tout pour décrire les inégalités dans l’accès aux technologies numériques. Cette expression remonte à un discours de Bill Clinton de 1996, et correspond selon lui à un imaginaire datant de l’époque du déploiement de l’internet.
Il faut rappeler qu’à peine 1% des familles américaines étaient alors équipées et connectées à Internet. En France, les premiers chiffres datent de 1998 et comptabilisaient 3% de Français connectés à Internet, contre 85% aujourd’hui. Cet imaginaire d’un internet global auquel tout le monde devrait avoir accès va ensuite être manipulé pour masquer un certain nombre de difficultés (sociales et économiques notamment) derrière une seule formule : la fracture numérique.
Voir la conférence de 10 minutes de Pascal Plantard, Professeur des Universités en Sciences de l’Éducation à l’université Rennes 2. Co-directeur GIS M@rsouin
Thierry PAUL, professeur documentaliste au Collège Ambrussum de Lunel, nous a livré ses impressions sur le rapport des élèves et des parents face à l’utilisation de l’ENT :
Selon vous, quelles sont les principales difficultés que vous observez chez les élèves et leurs parents, avec l’utilisation de l’ENT ?
“Tout commence avec la connexion de l’élève à l’ENT. Sans cette dernière, aucun usage du numérique par l’élève n’est possible, car tous les services sécurisés et d’utilité éducative sont accessibles dans l’ENT.
Le point essentiel est donc la gestion d’un seul et unique mot de passe, celui de l’ENT. L’élève doit absolument s’en souvenir, et ce, sans le noter dans son carnet de liaison, pour ne pas risquer une usurpation d’identité.
Côté parents, il importe donc de préférer s’assurer régulièrement que son enfant connaît bien son mot de passe, plutôt que de le changer dès qu’il a été oublié. D’ailleurs le plus souvent il n’a pas été oublié mais mal tapé au clavier.
Un autre écueil, est que certains parents connectent leur enfant à leur propre ENT au lieu du leurs. Ces deux comptes sont indépendants et un enfant ne devrait jamais accéder à l’ENT via le compte de ses parents. En outre, plus un élève se connecte fréquemment à son ENT, plus rapidement il retiendra son mot de passe.”
Quelles actions proposez-vous déjà aux familles pour les accompagner ?
“Nous nous appuyons sur une fiche qui aide l’élève à choisir son mot de passe, et à le cacher par simple pliage. La fiche doit être conservée à domicile, et l’élève doit la déplier régulièrement pour s’assurer qu’il a bien mémorisé son mot de passe.
Cette démarche commence mi-juin dans les écoles primaires, grâce aux professeurs des écoles, en lien avec les familles. L’objectif étant d’inciter ces dernières à faire mémoriser, durant l’été, le mot de passe à leur enfant pour la rentrée au collège.
Cette information est rappelée fin juin aux élèves de CM2 lors de la journée d’intégration, puis à la rentrée, aux parents de 6ème lors de l’accueil. Dès la première semaine, tous les élèves de 6ème ont une séance de connexion à l’ENT, pour noter leur identifiant dans leur carnet de liaison (emplacement dédié), s’inscrire aux différents services de l’ENT, et s’assurer que le mot de passe est opérationnel.
Fin novembre ce processus est affiné avec les responsables des écoles et du collège lors du conseil école/collège.
Sur le site du CDI, un onglet « En famille » est dédié à la parentalité numérique : Le coin des parents, Vie numérique en famille et Numérique éducatif (fiche mot de passe, plateformes numériques accessibles aux élèves…). Une adresse de courriel spécifique est également dédiée aux parents qui souhaitent échanger sur des problématiques liées au numérique.
Nous expérimentons tout juste ces dispositifs. Il doivent donc être évalués puis affinés.”
Qu’attendez-vous du volet parentalité du dispositif TNE ?
“Pouvoir échanger au sein du dispositif TNE sur ces problématiques, pour dégager une démarche commune, serait sans doute un avantage pour les familles.
J’attends avec impatience la mise en route de Pix Parentalité, non seulement pour aider les familles à progresser dans leurs compétences, mais aussi pour créer une dynamique globale avec leurs enfants, dans la logique d’apprentissage « Tout au long de la vie ».
Il me semble enfin qu’une concertation étroite de tous les acteurs est indispensable pour mettre en cohérence les interventions de chacun. Par exemple par une validation collective de certaines informations clés diffusées, au risque de rendre encore plus confus certains concepts et manipulations, qui sont déjà relativement complexes pour nombre de familles.”